je suis très, très, très, très, trèèèèès en colère. après nollie, de toute évidence. un peu après moi aussi, mais pas vraiment beaucoup, parce que, de toute façon, j'fais souvent les choses bien alors.. j'ai pas tant à m'en vouloir. mais un peu quand même. j'arrive les poings serrés devant chez elle, je toque. une fois, deux fois, trois fois. en fait, j'mets pas de pause entre, je toque juste de plus en plus fort. nollie ouvre-moi, tout de suite!

elle est loooooongue. doux jésus qu'elle est longue à venir m'ouvrir, là. alors que j'sais bien, moi, qu'elle est là, derrière la porte. je l'entends. sale chose. sale sale. puis elle ouvre, là, elle a l'air de s'en foutre. ben tiennnns fais comme si tu savais pas, nollie. fais comme si tu comprenais pas. ça te sauvera pas, tu sais. t'es si bête que ça? je rentre en furie, sans demander son avis, sans attendre de m'faire inviter. j'm'en fiche. j'fais c'que j'veux. surtout quand je suis en colère. et là, je suis très en colère. puis là, ça m'frappe. elles sont où tes affaires, nollie?

j'arrête de tourner en rond pour l'écouter me dire tout ça. toutes ces idioties. je la fixe avec le regard noir, les sourcils froncés. oui, c'est un peu censé lui faire peur. un peu. pas beaucoup. très drôle. j'enfonce mes mains au fond de mes poches puis j'me remets à faire les cents pas dans son salon, la pièce vide. presque. tu vas m'expliquer ce qui t'es passé par la tête pour faire un truc aussi.. idiot? et puis fais pas semblant de pas comprendre ça suffit hein!

j'vais dans la cuisine, en l'observant du coin de l'oeil. oh. il parle de ça. et là, c'est moi qui suis très en colère. « c'est quoi votre putain de problème, à vous tous? » j'vais le rejoindre dans le salon, puis j'me plante devant lui. « genre, quelqu'un se suicide, et tout l'monde pleure à son enterrement en mode 'cette personne était troooop classe, elle va trop nous manquer, j'espère qu'elle est mieux là haut, blablabla', mais PAR CONTRE, si on tente de s'suicider et qu'on a le malheur de ne pas réussir, on s'mérite des insultes? sérieux, c'est tellement classe, je JOUIS de bonheur! vous êtes cons, ou quoi? »

ah ben tiens. ben tiens, pis elle aussi elle est en colère, comme si elle avait le droit d'être en colère. elle dit toutes ces choses et à me retenir de ravaler mes larmes, parce que, oui, oh mon dieu, je suis capable de sensibilité, du coup, j'ai les mains qui tremblent. les mains qui glissent, et ma paume de ma main droite qui m'écrase sur sa joue. plus de bruit qu'autre chose, mais quand même. un gros sbaf. j'le regrette aussitôt. ma main se remet à trembler et je croise les bras. si tu t'étais pas loupée j'serais allé cracher sur ta tombe. t'es qu'une sale gamine égoïste. tu penses qu'à toi, même pas aux autres. puis là, j'dis ça tellement calmement, que c'est presque moche. non, c'est très moche, en fait. c'est même plus beaucoup de colère, c'est assez de déception, en fait.

j'le regrette. vraiment. ma main me picote et j'imagine même pas pour sa joue. j'ai même mal pour elle. j'baisse les yeux, j'ose plus vraiment trop la regarder en face, en fait. j'ai honte. j'aurais jamais dû lui lever la main dessus. j'me mords l'intérieur des joues de remords. elle recule, elle pleure, alors moi, j'avance à nouveau vers elle. j'tends ma main tremblante, tout doucement sur sa joue, j'voudrais bien essuyer ses larmes, puis j'me ravise. j'ose pas. je remets mes mains dans mes poches. j'suis peut-être égoïste, mais moi j'essaye pas d'abandonner lâchement ceux qui m'aiment.

elle me repousse puis elle a bien raison de toute façon. j'devrais plus la toucher, j'devrais plus l'approcher. j'devrais même partir, là, en fait. mais non. j'en suis pas vraiment capable, en fait. j'veux pas que tu recommences. jamais. j'veux plus jamais que tu fasses ça. en fait, même, si c'était possible, j'pourrais bien tuer pour que ça n'soit jamais arrivé, que t'aies jamais eu envie de faire ça.. j'me mâchouille un peu l'intérieur de la joue. ok, j'suis carrément gêné là. j'suis en colère parce que j'ai carrément flippé.. j'ai cru que j'te reverrais plus jamais. c'est tout. genre, no big deal. c'pas comme si j'faisais à demi-mot la révélation de l'année. si, si, je tiens à nollie. je suis capable de tenir à quelqu'un d'autre que moi pis ma famille.

son discours change. et j'sais plus quoi en penser. j'sais plus comment réagir, là. j'me sentirais très naïve de le prendre dans mes bras. alors j'lutte contre moi-même. j'suis fâchée. en colère. et flattée. « c'est juste pas l'impression que j'avais. » c'est un peu tout c'que je trouve à dire. silence. « peut-être que je me suis trompée. mais ça n'a plus vraiment d'importance, maintenant. »

voilà, j'ai eu mon moment de faiblesse et maintenant c'est fini. y a eu la dose pour les dix ans à venir. fini. je recroise mes bras sur mon torse pis j'fronce les sourcils un peu. parce que j'comprends pas. j'vois pas trop où elle veut en venir, en fait. pourquoi tu dis ça? qu'est-ce qui n'a plus d'importance? pourquoi ça n'en a plus?

je la regarde pas. non, non, non, je refuse de la regarder. je tourne ma tête à gauche, à droite. je regarde le sol, le plafond. je me pince les lèvres. c'est à cause de moi que t'as fait.. ça? c'est à cause de moi que tu t'en vas?

« non.. » enfin. « c'est.. » j'soupire. « .. c'est à cause de beaucoup de choses. tu me l'as dit au départ, que tu n'cherchais pas du sérieux. j'me suis accrochée à toi et j'aurais pas dû. point barre. j'ai pas assuré, cette année. vraiment pas. j'assure pas depuis que j'suis née, en fait. hahah. alors j'm'en vais. c'est tout. t'es libéré de ma personne. haha. »

okey. ça fait mal un peu, quand même. un mélange entre une grosse gifle et un coup de poing dans le ventre. un peu comme un pincement au cœur en fait. puis j'ai même envie de me vomir dessus. eww. donc c'est à cause de moi.. génial. elle a essayé de se tuer à cause de moi. génial. je suis officiellement le plus gros con qui existe. c'est pas, hm.. c'est pas parce que j'veux rien de sérieux que j'veux que tu partes pour autant, c'est même le contraire, en fait. peu importe, hm. prends confiance en toi, nollie. t'es pas une bonne à rien, t'es pas une plaie pour les gens qui t'entourent, tu.. personne ici veut être libéré de toi. certainement pas moi.

au prochain moment de folie.. appelle quelqu'un.. moi.. ..oleg.. son nom me reste coincé au fond de la gorge. j'veux pas vraiment qu'elle l'appelle lui, en vérité. elle s'installe dans mes bras, sans bruit, et je l'encercle. je frotte son dos doucement du bout des doigts, je cale mon visage contre son crâne. il est arrivé quoi comme.. choses?

bim. okey, j'm'attendais à tout sauf à.. ça. enfin, voilà, quoi. je la serre un peu plus contre moi puis j'embrasse sa joue tout doucement. j'me mets même à caresser ses cheveux. j'suis désolé.. je.. pourquoi tu m'as rien dit? non, c'est pas ça la bonne question à poser, en fait. non, on s'en fout. j'suis sincèrement désolé.. j'comprends. en vérité j'comprends pas parce que ça m'est pas arrivé. mais si un des nombreux de nous mourrait.. oh ben c'est sûr que j'ferais pas long feu après, c'est vrai.

hm. j'lui ai manqué. ouais, ouais bien sûr, pis elle aussi elle m'a manqué, c'est sûr, ouais. je sais, désolé.. j'passe à nouveau ma main dans ses cheveux, j'regarde autour de moi. tous ses cartons. puis si peu de meubles. en fait, ça m'brise le cœur, un peu. on fait comment, maintenant, si j'te dis que j'veux pas que tu partes?

j'étais si décidée à partir. ce n'était pas difficile, pour moi, de le faire. jusqu'à ce qu'oleg et jazz se pointent chez moi en mode 'ne pars pas'. « c'est probablement qu'une petite année. tu vas t'y faire. » même si au fond, j'souhaite pas vraiment que tu t'y fasses. « ça fait déjà des mois qu'on n'se voit plus vraiment. donc, ça change rien. » sauf qu'à la fin, tu vas m'manquer encore plus.

ça fait des mois, c'est vrai. pis la faute à qui? pas à moi. ou en tout cas, pas que moi, hm. non mais c'est pas pareil.. j'soupire et la relâche. je recule un peu, les mains dans mes poches. même si on s'voyait pas, j'te savais dans le coin, c'est.. rassurant? alors que si tu pars, bah.. tu s'ras plus là. logique, en même temps.