j'ris nerveusement. « non. » j'avais déjà assez brisé son image de papa comme ça. il voudrait savoir quoi, de toute? y'a rien qui peut être dit sans être dégoutant. j'soupire. j'garde le silence un long moment. « tu veux savoir quoi? que j'me suis jamais battu à l'école, que mes blessures, elles venaient d'ailleurs? t'sais, du moment où j'étais assez vieux pour me défendre un peu? » et parfois, j'pouvais pas me défendre du tout. parce que les armes, c'est légal, aux usa. les menaces verbales, sinon. « que si j'manquais l'école régulièrement, c'était pas parce que j'étais malade, mais c'est parce que j'avais trop mal? oh, et, qu'il en profitait pour recommencer? » mes yeux deviennent trempés. « alors, dis-moi ce que tu veux savoir, cruz. si ça t'intéresse tant. »

j'écoute toutes ces choses et, la vérité, c'est que non, je n'arrive pas à la supporter. non, j'suis pas aussi fort que je voudrais bien l'être. j'arrive plus à le regarder et je baisse la tête, les yeux sur mes pieds. c'est bon. j'en ai eu assez, ouais. j'veux rien entendre de plus. j'suis désolé. pour c'qui t'est arrivé, isa. et pour la façon dont j'ai réagi, à m'énerver alors que j'avais pas le droit. puis de pas avoir été capable de remarquer quoi que ce soit tout ce temps. j'suis désolé pour tout, en fait.

je m'assois à la table de la cuisine. « c'est passé, maintenant. life goes on. » life goes on, mais j'serai jamais en couple. mais j'aurai jamais d'enfants. mais j'garderai toujours toutes ces images en tête, jusqu'à ce que la mort nous sépare. life goes on.

hm. s'il le dit. j'hausse les épaules. tu m'dis tout, maintenant? tu m'fais assez confiance pour me dire tout? j'entends, s'il arrive quelque chose, dans sa vie. même si ça n'a rien, absolument rien à voir avec ça. mais quelque chose. de grave. ou de moins grave. tout, en somme. du genre, tout. puis je tourne la tête vers lui et je le regarde. ça me brûle les lèvres. puis, j'me lance. il ne m'en voudra pas de demander ça, pas vrai? j'suis son frère, de toute façon. isa.. t'as déjà fait l'amour avec quelqu'un?

« j't'ai jamais rien caché tu sais, mis-à-part ce secret énorme. » non, j'cache rien à mon frère. et ça, j'le cachais pas pour les mauvaises raisons. il me regarde, un peu drôlement. j'me demande sincèrement ce qu'il va dire. puis, sa question m'gêne un peu. « bah.. non.. en dehors de.. ça.. j'ai jamais.. genre.. » j'détourne le regard.

tant mieux. j'suis soulagé, qu'il n'me cache rien. j'lui souris, un peu. vraiment, ça me soulage vraiment. parce que c'est important pour moi. et puis j'ai ma question, qui me semble importante, mais qui semble le gêner, à lui. je fais la moue, un peu. mais tout ça, ça compte pas, de toute façon. pourquoi non? je me doute bien que rien que l'idée doit.. te répugner, j'imagine. mais c'est pas pareil, c'est.. c'est un moment important, c'est puissant et.. et contrairement à ce que tu peux penser, c'est beau. ouh, cruz le sensible. tu devrais essayer. j'hausse les épaules. moi j'dis ça, j'dis rien.

l'idée ne me répugne pas seulement, elle me donne envie de gerber. j'sais pas quoi lui répondre. j'sais pas ce que je manque, à ce qu'il parait, donc. eh bien, ça ne me dérange pas. pas du tout. « j'ai pas besoin de ça, cruz.. » merci tout de même de la bonne intention. « j'ai pas envie de ça, non plus. »

bon. s'il le dit. pourquoi pas. il ne sait pas, c'est tout. mais pourquoi pas. d'accord. je n'insiste pas, je le laisse tranquille avec ça. mais quand même. et avoir une copine, simplement? j'parle pas de faire des choses, mais juste trainer avec elle, vous tenir la main, vous embrasser et puis avoir des attentions. les attentions, toutes les choses qui m'échappent depuis un moment. #cruzinsistequandmêmeunpeu.

j'mentirai pas. parfois, j'aimerais avoir une copine, au plus profond de moi-même. mais c'est assez rare. et c'est pas plus mal comme ça. j'suis pas fait, pour vivre à deux. pas après tout ça. « non plus.. j'suis bien, tout seul. » à tomber amoureux de toutes les filles que tu ne peux pas avoir. bon, toutes, c'est exagéré. qu'une seule. lesbienne. « t'en fais pas pour moi. »

je fais encore la moue. ça m'embête vraiment, vraiment beaucoup pour lui, en fait. t'as intérêt à changer d'avis, j'compte bien être tonton un jour. à défaut d'être papa. parce que je suis persuadé que je serais bieeeen plus doué avec un gosse s'il n'est pas le mien. et en attendant, je vais profiter doublement des filles, pour toi. je ris un peu. comme si j'en profitais pas assez, déjà.

« dans vingt ans peut-être. » ou jamais. tout simplement. j'souris, parce que j'imagine que je dois sourire. eh non, j'peuplerai pas les vadnais de sydney. « ça veut dire quoi, ça? deux filles par nuit plutôt qu'une? » j'ris un peu. parce que, il en ramenait déjà bien assez comme ça.

j'souris, aussi. alors si j'ai ni neveu, ni nièce, j'veux que tu m'offres un chat. c'est presque pareil. c'est tout affectueux, un peu casse-pieds, et c'est mignon. puis j'ris, aussi. exact. mais pas en même temps.. ouuuu si. j'ris encore. il nous faut définitivement une chambre chacun, t'sais.

« j'vais t'offrir un chat avec plaisir. » c'est simple, un chat. et moi, ça m'engage à rien. j'te l'offre, il est à toi, puis point barre. « tsss. t'es terrible. » ouais, décidément, deux chambres. j'veux pas l'faire et j'veux surtout pas l'entendre. « insonorisé, aussi. c'est important. »

cool. depuis le temps que j'en veux un. enfin, j'vais enfin avoir un chat. mais, plus tard. s'il n'a pas d'enfants. c'est mal parti, c'est vrai. mais moi, j'garde l'espoir pour nous deux. ts. j'suis pas terrible, je profite. c'est tout. puis j'ris. hé, j'suis ambulancier, pas médecin, ça coûte cher les murs insonorisés. alooors, j't'offrirais une paire d'earplugs.

tss. plein d'argent. au moins, un de nous deux aura réussi financièrement, pour de vrai. eeet, en attendant t'es encore étudiant, c'est moi qui vais ramener principalement l'argent pour la bouffe. u know. donnnnc, puisque ça va être moi, on n'va pas avoir beaucoup d'argent. enfin, heureusement que j'ai quelques économies, déjà.

certes. un peu, mais pas tant que ça. oh non, pas tout. juste.. un peu plus de la moitié. ça sera logique, de toute façon. pas maintenant, non, tant qu'il y a qu'une chambre, la question ne se pose pas trop. dans pas longtemps, en tout cas. puis j'souris.

« ta moitié, j'vais payer la mienne. » de toute, j'avais réussi à mettre de l'argent de côté. je n'allais pas être étudiant pour l'éternité, non plus. donc c'était pas si grave. « dans pas longtemps, mouais. » j'allais devoir passer aux aveux, avant. et ça, c'était terrible. je n'osais même pas y penser.

hm. si tu veuuux. j'aurais pas le choix de toute façon, j'imagine. j'ris un peu. non, c'est sûr, il n'me laissera pas le choix. je le connais assez pour le savoir, ça. tout dépend de toi, isa. j'hausse les épaules. i mean, j'veux pas lui mettre la pression, mais je compte rester avec maman jusqu'à ce qu'elle le sache, alors tout va se passer en fonction de lui. mais j'pourrais être avec toi quand tu lui diras, si tu veux.

« en effet. » non, il n'aura pas le choix. « c'est possible que ça prenne quelques semaines, encore. » parce que hier, j'croyais encore garder ça secret jusqu'à l'infini. ainsi, j'me suis vraiment pas préparé mentalement. « j'ai l'impression qu'elle ne va pas me croire. c'est son mari, cruz. » puis, j'suis pas certain que j'désire que mon frère assiste à ça. l'univers de maman, qui s'effondre.

j'hausse les épaules. ça prendra le temps que ça prendra, c'est pas grave. j'ai hâte, très hâte de venir vivre avec isa. j'ai toujours eu hâte, en fait, depuis qu'il est parti de la maison sans me dire pourquoi, mais maintenant encore plus. seulement, j'aurais peur de laisser maman seule. et en même temps, je culpabilise de laisser isa seul. je me s'en mal, rien que d'y penser. j'ai la nausée de tout ça. j'suis perdu. oui, c'est son mari, pis alors? t'es son fils, t'es sa vie, elle n'a pas de raison d'pas te croire. regarde, moi, c'est mon père, pis t'es mon frère. mais je te crois, sur parole. parce qu'y a pas de raison, parce que tu dirais pas ça comme ça, sans raison. tu dirais pas ces choses-là si c'était pas vrai, isa. et même si c'est dur à accepter, maman le fera. maman elle est forte.

me connaissant, j'risque très fort probablement d'esquiver, en espérant que ça passe aux oubliettes. comme si c'était quelque chose que l'on pouvait oublier. j'anticipe déjà une engueulade avec cruz. pourquoi? parce que j'risque carrément pas de le dire de si tôt. on va devoir me casser un bras, pour que j'dise tout à maman. « j'veux juste pas.. gâcher sa vie. c'est tout. et bien que les chances qu'elle ne me croit pas sont, selon-toi, faibles, et bien elles existent tout de même. et j'sais pas c'que je ferais, tu sais. j'serais juste dans la merde. et j'ai pas envie. voilà. »

hm. oui ben, il est pas prêt à lui dire, quoi. à l'écouter, c'est même à croire qu'il n'a pas envie de lui dire tout court. j'pense vraiment pas que tu gâcherais sa vie, j'pense qu'elle a le droit de savoir. mais j'veux pas me disputer avec isa, une deuxième fois aujourd'hui. c'est mieux comme ça, là, j'veux pas tout gâcher. prends-le temps d'y réfléchir et, fais-le comme tu le sens, c'est pas important. si, c'est très, très important, même. mais sache que si tu lui dis, j'peux être là si tu veux. et sache que j'supporterais pas si tu lui dis pas, aussi. ahah.

si, elle a le droit de savoir. j'sais pas comment m'y prendre. en fait, j'ai assez d'excuses pour repousser le truc jusqu'en 2056. « hm. » et tout à l'heure, j'essayerai de changer de sujet. peut-être bien que, dans l'un de mes rêves les plus fous, ça pourrait passer aux oubliettes pour les semaines à venir. « non, c'est pas important. » pas du tout, même. il pourrait être là? j'sais pas si j'veux. quoi que, ça m'rendrait peut-être plus crédible aux yeux de maman. je sais pas. « mouais.. non.. non.. ça va aller. si c'est pour faire une tornade, j'préfère que t'y assistes pas haha.. »